LA POLITIQUE ISRAELIENNE VIS-A-VIS DES NON-JUIFS

Publié le par shlomo

La politique du ministère de l’Intérieur vis-à-vis des non juifs depuis 15 ans

J.-M. Allafort
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26 juillet 2007

 

Texte repris du site Un écho d’Israël.

 

Depuis une dizaine d’années, on constate une évolution de la politique du ministère de l’Intérieur vis-à-vis des non-juifs, en général, et des chrétiens, en particulier. Nous allons essayer ici d’en dégager les grandes lignes.

En 1995, le ministre de l’Intérieur, Haïm Ramon (travailliste) accorda de nombreux visas de résidents permanents ou temporaires aux non-juifs résidant depuis longtemps dans le pays. A la même époque, il était relativement facile d’obtenir des visas pour des étudiants ou des volontaires. Avec l’élection de Binyamin Netanyahu (Likoud) et l’arrivée d’un ministre Shass, Eli Souïssa, à la tête du ministère de l’Intérieur, les directives changèrent. Les visas de résidents temporaires ne furent pas renouvelés, sauf exceptions, et ceux qui avaient déjà de tels visas ne purent plus faire la demande de résident permanent. Il y avait, certes, des exceptions, mais la politique mise en place par le ministre était claire : limiter au maximum le nombre de non-juifs en Israël. En trois ans, Eli Souissa nomma de nombreux fonctionnaires qui sont encore en place aujourd’hui.

Le ministère de l’Intérieur devint peu à peu une place forte contrôlée par des fonctionnaires au pouvoir quasiment illimité. Régulièrement, la Cour Suprême dut intervenir pour rétablir un minimum d’équité.

Pour les non-juifs, aussi bien résidents temporaires qu’étudiants ou volontaires, obtenir un visa devenait de plus en plus difficile. Chaque année, de nouvelles mesures restrictives étaient prises et les démarches administratives s’en trouvaient multipliées d’autant. Pour des « raisons de sécurité », les étudiants venant de certains pays ne pouvaient plus venir. Parallèlement, à la même époque, Israël favorisa grandement l’arrivée en masse de travailleurs étrangers. Il était préférable d’employer des Roumains plutôt que des Palestiniens. Eli Souissa développa une politique dans ce sens, qui s’avérera problématique.

En 1999, Ehud Barak, élu à la tête du gouvernement, nomma Nathan Sharansky (parti des Russes) au portefeuille de l’Intérieur. Il y resta un peu plus d’un an sans réussir à faire changer la tendance. Il était d’accord sur un point avec son prédécesseur : ne pas favoriser la venue de non-juifs en Israël. Il lança une campagne de conversions au judaïsme auprès des nouveaux immigrants non-juifs venus des pays de l’ex-Union Soviétique. Cette campagne échoua en grande partie à cause des obstacles dressés par les tribunaux rabbiniques.

En 2001, Sharon nomma Eli Yishaï (Shass) à la tête de l’Intérieur. Le nombre des demandes de visas diminua énormément, suite à l’éclatement de l’Intifada. Sharon prôna une politique de fermeté face aux travailleurs étrangers illégaux. A l’Intérieur, on mit en place une série de mesures pour limiter leur nombre. En conséquence, des étudiants, des religieux ou des volontaires des pays d’Afrique, ou d’Europe centrale, eurent énormément de difficultés à obtenir un visa. La campagne électorale du Shass fut aussi fondée sur un fantasme : le nombre des chrétiens ne cesse d’augmenter en Israël et les Eglises se multiplient. Le parti Shass voulut entreprendre une judaïsation de la société israélienne et chasser les missionnaires. Les chrétiens furent dans le collimateur des fonctionnaires. Les plaintes se firent de plus en plus nombreuses. Malgré réclamations et interventions de la diplomatie vaticane rien ne changea.

En 2003, Sharon nomma Abraham Poratz (parti laïc libéral Shinouï) au ministère de l’Intérieur. Les non-juifs, en général, et les chrétiens, en particulier, reprirent confiance suite à cette nomination. Le ministre, qui reçut les responsables des différentes Eglises, ne facilita en fait jamais l’obtention de visas pour les chrétiens.

Lorsque Shinouï quitta le gouvernement, Sharon nomma Ophir Pinès (travailliste) à la tête du ministère. C’est sous sa direction que de nouvelles mesures furent prises : les religieux renouvelleront leur visa chaque année, et non tous les deux ans. Ils devront justifier leur présence en envoyant une lettre pour expliquer les raisons de leur séjour dans le pays. Le processus d’obtention de la résidence permanente se compliquera : il faudra fournir de nombreux documents, la résidence temporaire, dont la durée était de 5 ans, sera allongée dans bien des cas à 7 ans. Il est certes possible de faire une demande de résidence permanente, mais après au minimum 15 ans dans le pays. Au mieux, un non-juif (je ne parle pas ici des couples mixtes) peut espérer obtenir le statut de résident permanent après 22-23 ans dans le pays. Pinès limitera au maximum la présence des travailleurs étrangers, y compris légaux. Un chrétien, qui n’est pas un religieux, a la plus grande difficulté à rester dans le pays. Les expulsions se multiplieront.

Avec l’arrivée de Roni Bar-On (Kadima) au poste de ministre de l’Intérieur, un changement significatif se produisit pour les enfants des travailleurs étrangers nés dans le pays, et ayant effectué leur scolarité en Israël. 1 200 enfants et adolescents obtinrent la résidence permanente. Malgré les appels répétés du pape Benoît XVI auprès de Ehud Olmert et de Shimon Pérès, le ministère ne facilite toujours pas l’obtention de visas, tant pour les étudiants chrétiens des pays d’Afrique ou du Moyen-Orient, que pour le personnel ecclésiastique. Les communautés chrétiennes se résignent et le nombre de demande de visas est en baisse.

Le remaniement ministériel de juillet 2007 place, à la tête du ministère de l’Intérieur, Meïr Shitrit (Kadima). Sa première préoccupation, a-t-il déclaré au quotidien Haaretz, sera de diminuer l’immigration des non-juifs en Israël. Aujourd’hui, près de 70% des nouveaux immigrants ne sont pas juifs. Les critères doivent être reconsidérés.

En y regardant de près, malgré les changements fréquents de ministres de l’Intérieur, une ligne politique claire se dégage. La question de l’identité d’Israël comme Etat juif est au cœur des décisions prises. Pour ce qui concerne la minorité chrétienne (et non les nouveaux immigrants non juifs), la multiplication des plaintes, des articles de presse et des enquêtes ne change pas grand chose.

 

Jean-Marie Allafort

 

© Un écho d’Israël

 

Mis en ligne le 31 juillet 2007, par M. Macina, sur le site upjf.org

Publié dans ISRAEL

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