UNE COUPURE DE GAZ AVEC UNE SIGNATURE RUSSE
15.01.2008
C’est l’impasse dans l’affaire de la coupure de gaz entre le Turkménistan et l’Iran. La semaine dernière, les mollahs avaient expédié une équipe de négociateurs vers ce pays et à la lumière des premières rencontres, ils avaient annoncé la possibilité d’une reprise du flux pour le lundi 14 janvier. Cette reprise n’a pas eu lieu et il y a une rectitude suspecte chez le Turkménistan qui évoque tantôt une panne technique, tantôt un contentieux sur le prix (retards de paiements). Ces prétextes rappellent étrangement ceux formulés par les russes quand pendant un hiver très rude, ils ont coupé le gaz destiné à l’Ukraine. Dans cette présente affaire, il y a à la fois une signature russe, mais aussi un facteur russe qui était invisible jusqu’à il y a encore un jour.
En fait, depuis le début du conflit, nous n’avons guère entendu les russes bien qu’ils soient les alliés stratégiques de Téhéran et le soutiennent aussi bien dans ses options nucléaires et que ses envies d’achats d’armes sophistiquées. Ils auraient pu dénouer le conflit d’autant plus que la Russie et l’Iran sont les seuls clients du gaz turkmène. Ce pays en vend 41 Gm3 (milliards de mètres cubes) à la Russie et 8 Gm3 à l’Iran. Si les russes l’avaient souhaité, ils auraient pu se porter garants des mollahs pour les tirer d’affaire.
Cependant, comme nous l’avions vu à maintes reprises sur plusieurs cas, si l’Iran et la Russie sont des alliés par défaut l’un pour l’autre, ils restent des concurrents en matière pétrolière ou gazière. En ce qui concerne la coupure du gaz turkmène vers l’Iran, il est même plus que probable que l’initiative soit venue de Moscou qui peut facilement dédommager les turkmènes en leur achetant le volume destiné à Téhéran.
Le facteur russe qui était invisible jusqu’à il y a encore un jour | La coupure décidée par le Turkménistan a eu lieu le 29 décembre, quelques jours après l’annonce de Téhéran de passer un important accord important gazier avec la firme italienne Edison, contrat qui place l’Iran en concurrent direct de la Russie comme principal fournisseur de gaz à l’Europe.
Les dernières déclarations d’un responsable pétrolier iranien (Mohammad Souri) confirment cette option : les mollahs souhaitent produire sous peu un supplément de 216 milliards de mètres cubes de gaz en exploitant simultanément les 24 phases du gisement de Pars Sud. Leur objectif sera d’exporter plus de gaz que les deux premiers exportateurs mondiaux c’est-à-dire la Russie et le Canada réunis. Au bout du compte, la Russie perdra à la fois d’importants revenus mais aussi un allié géostratégique irremplaçable.
Le rôle de la Russie est visible à présent (suite à notre analyse) car elle n’est pas intervenue pour aider son allié iranien, malgré son influence certaine sur le Turkménistan qui dépend totalement de Moscou pour son secteur énergétique (sa principale source de revenues). En tant que principal acheteur du gaz turkmène et seul pays par où transitent le gaz et le pétrole turkmènes vers l’Europe, la Russie aurait pu agir pour sauver son principal allié anti-américain… Elle brille par son absence !
En d’autres occasions quand les mollahs avaient essayé de prendre le large, les russes avaient réagi en orchestrant une suspension de leur coopération sur un autre sujet vital pour Téhéran : la centrale de Bouchehr. Ils avaient alors combiné ce même genre de prétextes : retard de paiements ou encore problèmes techniques.
Dans cette affaire de gaz turkmène, non seulement, les russes n’ont pas rien tenté pour secourir les mollahs, mais en plus ils se sont précipités pour récupérer leur client turc. Les mollahs devraient sans doute revoir leur projet de coopération énergétique avec l’Europe pour calmer la colère russe, et nous verrons rétablir le gaz turkmène. Il faudra donc surveiller l’évolution pro-européenne des mollahs.
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