LA STRATEGIE DE NON-VICTOIRE D'ISRAEL

Publié le par shlomo

par Daniel Doron, pour Wall Street Journal, le 8 Mars 2008
Par
Thème : Proche-Orient
 
M. Doron est président du Centre israélien pour le progrès économique et social (www.icsep.org.il)

Titre original : Israel's No-Win Strategy

Traduction : Objectif-info
 

Jérusalem - Le massacre de ce jeudi à Jérusalem d’étudiants d’un séminaire de rabbinat met en lumière l’échec de la puissante machine militaire israélienne qui ne réussit pas à enrayer les attaques des terroristes palestiniens. Elle révèle également de sérieuses insuffisances dans la stratégie et la tactique d'Israël.

Elles ont coûté cher à Israël. Elles nuisent également à la guerre mondiale contre le terrorisme, où Israël est aux premières loges.
Naturellement, on ne peut pas arrêter tous les terroristes-suicide. Mais depuis maintenant sept années, les terroristes du Hamas tirent des roquettes sur les villes israéliennes du sud à partir de Gaza. Les gouvernements israéliens dirigés par Ehud Barak, Ariel Sharon et Ehud Olmert ont tous juré de mettre un terme à ces attaques. En dépit d’une supériorité militaire écrasante, les gouvernements israéliens n’y sont pas parvenu.

Israël a enregistré quelques victoires impressionnantes dans son combat contre le terrorisme, en particulier contre les attaques venues de Cisjordanie. De nombreuses tentatives du Fatah et du Hamas d'envoyer des terroristes-suicide en Israël ont été mises en échec par la combinaison d'un excellent système de renseignement, d’opérations spéciales audacieuses, et de la capacité de pénétration de l’armée dans les zones sous autorité palestinienne pour des interventions à chaud ou des frappes préventives. Il n’en n’est pas de même à Gaza.

Dans cette enclave, une population radicalisée a élu un gouvernement Hamas déterminé à éliminer Israël. Après le retrait inconditionnel de la bande de Gaza dans l’espoir que les Palestiniens consacreraient leur énergie à la création d’un État, le territoire abandonné a été immédiatement utilisé pour lancer des attaques contre Israël. Pourquoi ce dernier ne parvient-il pas à les mettre en échec ?

Ici, les gouvernements sont généralement peu efficaces, malgré des budgets gargantuesques qui consomment presque la moitié du produit national, soit 160 milliards de dollars. Ils sont paralysés par des chamailleries permanentes et des bureaucraties byzantines. Comme on le sait depuis le début de la guerre de Yom Kippour de 1973, leur dysfonctionnement a contaminé les hautes sphères de la défense israélienne. Cette année-là, le cabinet gouvernemental et la hiérarchie militaire israéliens ont réagi avec une confusion et une bêtise qui ont été tout près de conduire le pays à la ruine. Le récent rapport d’enquête de la Commission Winograd sur la deuxième guerre du Liban montre que ces carences sont endémiques dans le système de gouvernement israélien en même temps hyper centralisé et désorganisé.

Plus que dans la plupart des pays, les responsables politiciens israéliens passent leur temps à des combinaisons politiques pour acheter l'appui de groupes d'intérêt puissants, en distribuant les largesses du gouvernement. C’est ce qui est à l’origine de la transformation de la vie politique en lutte de factions, de la corruption croissante. Mais c’est aussi du temps et de l'énergie dilapidés, que les dirigeants devraient consacrer à des questions touchant à la vie et la mort. Comme la Commission de Winograd l’a établi, le gouvernement de M. Olmert a lancé la seconde guerre du Liban sans ouvrir les débats préalables nécessaires et sans effectuer les préparatifs indispensables. Pendant cette guerre relativement longue, le gouvernement et les chefs militaires n'ont pas su définir leurs objectifs. Ils ont émis des directives vagues et contradictoires qui se sont traduites par des échecs répétés et des pertes inutiles en vies humaines. Ce sont seulement le courage et la ténacité exceptionnels des soldats et des officiers sur le terrain, et de la population sous les bombardements, qui ont sauvé la mise.

Les gouvernements israéliens n’ont pas fait grand chose pour entraver le réarmement massif du Hamas à Gaza, grâce à des armes iraniennes acquises avec à de l'argent saoudien, acheminées à Gaza avec la connivence de l'Égypte. Israël n'a pas même fait pression sur son grand allié, les États-unis, pour qu’il force la main de ce pays et l’oblige à mettre un terme à sa violation flagrante de l’accord de paix avec Israël, un accord de paix qui donne à l'Égypte le bénéfice de milliards de dollars d'aide américaine.

Mais les échecs les pires viennent de l'adoption d’une stratégie de non-victoire. Dans les échelons politiques et militaires supérieurs d’Israël, nombreux sont ceux qui sont convaincus que le terrorisme ne peut pas être défait par la force, et que pour y mettre un terme il faut passer des compromis et accepter certaines de ses exigences. Mais comment "passer un compromis" avec une organisation terroriste qui a juré de vous détruire ?

Le manque de volonté de la direction politique israélienne de remporter la victoire et sa faiblesse politique chronique, l'ont empêché de résister aux pressions de l'Europe et de certains cercles américains (la plupart du temps le Département d'état et la CIA), préférant s’accommoder du Hamas et renforcer l'Autorité palestinienne soi-disant favorable à la paix. Étrangement, Israël continue à fournir au Hamas, pour "des raisons humanitaires," de l'électricité subventionnée et des marchandises dont l'acier et les produits chimiques requis pour produire les fusées qu’on lui tire dessus. Il continue à fournir de l'argent et des armes en soutien à une autorité palestinienne désespérément corrompue.

Dans un tel contexte, quelle est la stratégie qui permettrait de l’emporter ? L'histoire a prouvé maintes et maintes fois que la confrontation militaire est efficace. Israël pourrait remporter une victoire militaire en éliminant ou en incarcérant la direction du Hamas, pas deux ou trois personnes par mois (ce qui fait que ces gens sont remplaçables) mais quelques centaines d’un coup. Si l’on brise sa structure de commandement et son appareil logistique, le Hamas peut être rendu inopérant.

Mais pour cela, Israël et les démocraties occidentales doivent considérer le défi mortel du terrorisme comme une guerre pour la survie, et pas comme série d'escarmouches. Et dans la guerre, il faut combattre pour gagner, par tous les moyens de la guerre.


Publié dans ISRAEL

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