RETOUR A L'OPTION JORDANIENNE
Retour à l'option jordanienne : un accord sur le statut final est irréalisable pour quatre raisons
par Giora Eiland pour Yetnews
Thème : Proche-Orient
Giora Eiland est général de réserve de l’armée israélienne, et ancien chef du Conseil national de sécurité
L'article de Giora Eiland a été publié le 16 avril 2008
Titre original : Back to the Jordanian option
Traduction : Objectif-info
Le premier ministre continue à rencontrer Mahmoud Abbas à intervalle rapproché, les visites d’hôtes américains de rang élevé se poursuivent sans relâche afin de progresser sur la voie d’un accord avec les Palestiniens, et Mme Livni, le ministre des affaires étrangères, explique que le seul obstacle à un accord sur le statut final réside dans l'existence des radicaux, qui y sont opposés.
Apparemment tout est clair sur le sujet en discussion : deux pouvoirs entre le Jourdain et la mer Méditerranée, avec une frontière correspondant plus ou moins aux lignes de 1967. Quiconque entre dans les détails aboutit plus ou moins à ce que le Président Clinton a proposé il y a sept ans et demi.
Cependant, en arrière plan, les conditions étaient meilleures à cette époque qu'elles ne le sont aujourd'hui. Le président des États-Unis pesait de tout son poids pour arriver à un succès du processus de paix, le premier ministre israélien Éhoud Barak était déterminé à réussir, et le leader palestinien Yasser Arafat, aussi problématique qu'il fut, était reconnu par son peuple comme son chef. En outre, à l’époque, avant la deuxième Intifada, la confiance entre les parties était plus grande.
Aussi pourquoi devrions-nous croite que ce qui a échoué dans le passé va réussir maintenant ? Un accord sur le statut final est irréalisable dans un avenir prévisible pour quatre raisons.
1. Ce qu’un gouvernement israélien peut offrir de mieux aux Palestiniens sans compromettre sa survie politique est bien inférieur au minimum qu’un gouvernement palestinien puisse accepter sans compromettre sa survie politique. Le clivage entre les deux parties est grand, et il augmente au fil du temps, au lieu d’être contourné.
2. Il n’y a pas de confiance réciproque dans la volonté d’aboutir à un accord ni dans l’aptitude à le mettre en application. Quand un accord est signé, on fait l’hypothèse que l’autre partie à l’intention de le mettre en œuvre et est capable de le faire. Ce n'est pas ce qui se passe quand il s’agit d’Israël et de l'Autorité palestinienne. L'absence de volonté palestinienne (d’obtenir un petit état divisé en deux territoires séparés et de le considérer comme la fin du conflit) est une réalité gênante. Supposons qu'un référendum soit organisé chez les Palestiniens concernant la nature de la solution au conflit, avec deux réponses possibles. Première réponse : deux états pour deux peuples sur la base du plan Clinton. Deuxième réponse : pas d’État palestinien, mais pas d’État d’Israël non plus, la terre d’Israël tout entière étant divisée entre l'Égypte, la Jordanie, et la Syrie. Quel serait le résultat de ce référendum imaginaire ? J'estime que plus de 50% des Palestiniens voteraient sans hésitation pour la deuxième option. Un État palestinien n'a jamais été au centre des aspirations des Palestiniens. Les dispositions psychiques des Palestiniens sont basées sur d'autres aspirations, comme la "justice," la "vengeance," la reconnaissance de leur situation de victimes, etc.…
3. Le Hamas. Il continuera à être assez fort pour torpiller tout accord diplomatique qui mettrait un terme au conflit.
4. Même si un miracle se produit, si un accord sur le statut final est conclu, et même s’il est mis en œuvre avec succès, il n’aboutira pas à la stabilité mais plutôt à l'opposé. Il n'y a aucune chance pour que le petit État palestinien, divisé en deux territoires, et pauvre en ressources puisse devenir la patrie d’un peuple heureux
Que faire alors ? Il faut rebattre les cartes et essayer d’imaginer d'autres solutions. L'une d'entre elles est un retour à l'option jordanienne. Les Jordaniens ne l'admettront pas publiquement, mais un État palestinien en Cisjordanie est pour eux la plus mauvaise des solutions. Ils savent qu’à l’issue d'une courte période de temps, cet État serait gouverné par le Hamas. La Jordanie comporte une majorité palestinienne et une opposition puissante parmi les Frères musulmans. Au moment où elle partagera une frontière avec un État Hamas, le régime Hachémite se trouvera face à un danger immédiat.
D'autres options sont des solutions régionales dans lesquelles l'Égypte et la Jordanie apporteraient un territoire à l'État palestinien. C’est tellement contraire aux perceptions ordinaires que cela n’a aucune chance de se matérialiser, mais nous pouvons montrer que les grands gagnants d’un tel arrangement seraient de fait l'Égypte et la Jordanie.
Ce qui est clair est que des négociations continuelles qui ne peuvent amener aucun résultat positif sont au mieux une perte de temps : elles pourraient au pire, conduire à une troisième Intifada.