REVUE DE PRESSE ARABE

Publié le par shlomo


Par Sophie Castella
pour Guysen International News



Les négociations de paix israélo-syriennes, pour lesquelles la Turquie fait office de médiatrice laissent le monde arabe dubitatif. Les raisons qui incitent Jérusalem et Damas à envisager la paix sont-elles réellement celles qui sont publiquement évoquées ?

La semaine dernière, les éventuelles négociations de paix entre la Syrie et Israël ont fait la Une des journaux. Et pour cause : le Premier ministre Ehoud Olmert aurait accepté de céder le Golan à la Syrie en échange de la paix.

Des propos confirmés par le président syrien Bachar Al-Assad, et qui ont provoqué une vague d’opposition au sein du gouvernement israélien.

Dans le monde arabe, on s’interroge sur cette prise de position soudaine d’Ehoud Olmert. Certains affirmant que les raisons qui poussent ce dernier à chercher la paix sont loin d’être celles que l’on pense.

"La Syrie a, pendant des années, appelé à l’ouverture de négociations de paix avec Israël et a toujours été ignorée. Que signifie alors ce soudain revirement de position d’Ehoud Olmert ?", s’interroge Linda Heard, du journal Arab News Newspaper.

"Pourquoi une nation telle qu’Israël, qui ne doit rendre des comptes qu’à Washington, déciderait aujourd’hui de rendre un territoire possédant de grandes réserves d’eau à un ennemi qui ne représente même pas une menace existentielle ?"

Pour elle, la raison en est simple. En signant un accord avec Damas, Israël tente de briser les liens qui unissent la Syrie avec l’ennemi juré de l’Etat hébreu, Téhéran.

"Si Damas signe la paix avec Israël, l’Iran sera isolé et le sud du Liban ainsi que Gaza seront plus vulnérables face à une éventuelle réoccupation israélienne", soutient-elle.

Ainsi, "Israël parviendrait à briser le bloc ennemi sans avoir à tirer une seule balle. Et il n’aurait qu’à attendre patiemment que le Hezbollah et le Hamas périssent par manque d’argent, d’armes et d’alliés".

Des propos également soutenus par le journaliste Tariq Alhomayed d’AsharqAlawsat. Pour ce dernier, la paix avec la Syrie est un moyen pour Israël d’échapper au dilemme de la "confrontation militaire inévitable qui se profile à l’horizon".

"Pour la première fois, Israël est encerclé par l’Iran sur trois fronts : le front sud Libanais avec le Hezbollah, le front de Gaza avec le Hamas et le front syrien", explique-t-il.

Ainsi, en signant un accord avec Damas, Israël mettrait un terme à la coopération irano-syrienne qui met gravement en danger l’Etat hébreu. La preuve : Ehoud Olmert est prêt à sacrifier le plateau du Golan.

Mais dans ce cas, quel serait l’intérêt pour la Syrie de signer cet accord ?

Selon Tariq Alhomayed, Damas espère obtenir deux choses dans le cadre de ces négociations de paix. Le Golan, et la fin de l’isolement de la Syrie dans le monde arabe et au niveau international.
"Aujourd’hui, la Syrie n’a pas d’autres choix que de signer la paix avec Israël pour récupérer le Golan et se placer en position de force face à ses opposants", déclare-t-il.

A la suite de l’échec du sommet de la Ligue arabe de Damas, et de la crise politique durable du Liban, la réputation syrienne a en effet été largement endommagée.

Cet accord lui permettrait donc de retrouver un peu de crédibilité aux yeux du monde. Mais il existe également une autre raison à cet engagement syrien, qu’explique notamment Elias Harfoush, journaliste au Dar Al Ayat.

Pour ce dernier, un accord de paix israélo-syrien permettrait à Damas d’être lavé de tout soupçon en ce qui concerne son éventuelle coopération avec le Hezbollah, le Hamas et l’Iran.

Et l’argument serait le suivant : dans la mesure où cet accord n’a rien de bénéfique pour ces trois acteurs, si la Syrie décide tout de même de signer, cela implique que cette coopération n’est pas si forte que cela.

Un retournement de situation qui pourrait être favorable à l’image de la Syrie dans le monde. Mais quelles que soient les raisons qui poussent les leaders israéliens et syriens à envisager la paix, le monde arabe ne croit pas en la réussite de cette négociation.

Pour le journaliste Tariq Alhomayed, "la perspective de la guerre dans la région est en effet beaucoup plus probable que la perspective de la paix". Et ce, pour une raison majeure : les Etats-Unis s’opposent à cet accord israélo-syrien.

Une allégation reprise par le journaliste Elias Harfoush. Celui-ci soutient en effet que Washington attend beaucoup plus de la Syrie qu’Israël.

"C’est peut-être d’ailleurs ce qui a poussé Bachar Al Assad à soutenir que des progrès dans les négociations seront difficiles à obtenir avec l’administration Bush", explique-t-il.

A défaut de parvenir à un accord israélo-syrien, certains journalistes tentent d’offrir une alternative à Damas.

Linda Heard, d’Arab News Newspaper, affirme ainsi que "le seul moyen de briser la tactique vénéneuse d’Ehoud Olmert (qui consiste à conclure un accord de paix avec la Syrie pour affaiblir le bloc ennemi) est que tous les pays arabes se rassemblent autour de la Syrie et lui disent que le seul accord de paix possible est celui qui inclura tous les pays du monde arabe".

Un message quelque peu utopique après l’échec du sommet de la Ligue arabe…

Publié dans MONDE ARABO-MUSULMAN

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