Des politiciens aux poches rembourrées

Publié le par shlomo

Caroline Glick
 THE JERUSALEM POST
                                

Adaptation française de Sentinelle 5768 ©
 
Selon toutes les sources, le millionnaire new-yorkais Morris Talansky a fait bonne figure devant la Cour de District de Jérusalem mardi. En décrivant les centaines de milliers de dollars en liquide qu’il a données au premier ministre Ehud Olmert depuis qu’il l’a rencontré pour la première fois au début des années 1990, il a convaincu l’auditoire que véritablement, la seule chose qui le préoccupait était le bien-être du Peuple juif.

Il a fait fondre le Coeur des journalistes par ses protestations de pure intention en décrivant comment il a laissé Olmert utiliser sa carte de crédit pour payer des suites d’hôtels de luxe aux USA, et des vacances de rêve en Italie. Il ne s’est jamais attendu, en un million d’années, à recevoir le moindre bénéfice personnel de ses largesses.

Olmert, voyez-vous, était son héros. Il vénérait le maire de Jérusalem, convoitant des stylos de prix et des montres de luxe et des cigares coûteux. Il aurait fait n’importe quoi pour lui, parce que en ce qui concernait Talansky, un Olmert heureux avec un Havane entre les mâchoires, un Mont Blanc en main, et une Rolex à son poignet étaient bons pour les Juifs.

Talansky a présenté un aspect légèrement moins flatteur, a montré un côté légèrement moins idéaliste de sa personnalité, devant une Cour de Justice de New York. Ca a été devant la Cour de District de Manhattan que Talansky et des collègues casse-cou se sont tournés quand ils ont décidé de poursuivre les « IAI » (Israel Aerospace Industries) pour leur refus de vendre des images de satellites espions israéliens au gouvernement d’Hugo Chavez du Venezuela.

Talansky et ses collègues en affaires détiennent une part minoritaire de la firme israélienne ImageSat. IAI est l’actionnaire majoritaire. ImageSat vend des images satellites des satellites espions israéliens, à des gouvernements étrangers. Et Talansky, qui se soucie tant d’Israël qu’il a bourré les poches d’Olmert depuis 15 ans – et ses associés -pensent qu’il est injuste qu’IAI refuse de vendre ces images au Venezuela. Le fait que Chavez soit l’amigo latino-américain du président iranien Mahmoud Ahmadinejad, prétendent-ils, ne devrait pas affecter leur capacité de gagner un dollar.

Mais bien sûr, Talansky n’a jamais rien voulu d’autre que le meilleur pour Israël – c'est-à-dire pour Olmert. Et il ne s’est jamais attendu à recevoir quoi que ce soit en retour de son souci d’Israël – c'est-à-dire de la part d’Olmert.

La semaine dernière, le ‘Ma'ariv’ a rapporté qu’Olmert a contacté un diplomate israélien au Venezuela pour lui demander d’expédier une proposition d’accord de 18 millions de $ entre le gouvernement Chavez et ImageSat ; mais le ministre de la défense à mis son veto à l’accord pour quelque raison insondable. Olmert bien sûr, avait les motifs les plus purs. Et même si vous ne croyez pas que le seul bien d’Israël a justifié ses actes, eh bien

Olmert a nié le reportage du ‘Maariv’, si bien que tout cela n’est probablement que mensonges, de toutes façons. De même pour la lettre d’Olmert envoyée au ministre de la défense de Colombie, l’encourageant à contracter avec ImageSat pour ses images satellites, eh bien, c’était pour le bien de l’ordre. Cela n’avait rien à voir avec son homme aux enveloppes.

Là repose le problème avec les enveloppes de Talansky : d’un côté, nous avons le juif américain sioniste qui ne veut que le meilleur pour Israël. De l’autre, nous avons un homme d’affaires américain lié à des fournisseurs de l’armée israélienne qui pense que les préoccupations de l’armée d’Israël ne devraient pas affecter sa marge bénéficiaire.

Dans les deux cas, nous avons un premier ministre ayant un penchant pour le jugement erroné sur exactement chaque question stratégique et politique parvenue sur son bureau depuis qu’il a pris son poste. Et nous avons un premier ministre qui est le sujet de cinq enquêtes séparées pour corruption, qui a heureusement bien garni ses poches avec l’argent liquide de Talansky, qui se délecte d’une consommation ostentatoire décadente, et dont les collaborateurs et les collègues les plus proches sont aussi sujets à des enquêtes pour corruption criminelle, ou ont déjà été condamnés dans de telles enquêtes.

A ce stade des affaires, les Israéliens sont obligés d’envisager la possibilité qu’Olmert puisse ne pas prendre les mauvaises décisions politiques parce qu’il est incompétent, mais parce que la mauvaise politique est bonne pour ceux qui lui bourrent les poches. Et cela est une situation intenable.

Il est possible que l’affaire Talansky puisse finalement entraîner le naufrage du gouvernement Olmert. Si ‘Haaretz’ et le gourou en communication Reuven Adler ne parviennent pas à remplacer Olmert par ses collègues incompétents, le ministre de la défense Ehud Barak et la ministre des affaires étrangères Tzipi Livni, il y a une chance que les Israéliens puissent finalement avoir l’opportunité d’élire un nouveau Parlement (Knesset) et un nouveau gouvernement.

Mais alors que des élections anticipées deviennent une éventualité plus nette, il est bon de considérer le lien entre le système électoral et la capacité d’hommes comme Olmert de s’élever au pinacle de la pyramide politique d’Israël. Car ce ne sont pas seulement les ruses politiques d’Olmert qui lui ont permis d’être élu, puis de rester en poste pendant plus de deux ans bien qu’il ait perdu une guerre, coulé l’alliance stratégique avec les USA, et permis qu’Israël soit attaqué avec des roquettes depuis Gaza. Olmert est un produit du système électoral dysfonctionnel d’Israël.

Dans une perspective légale, le système électoral d’Israël a été taillé pour des hommes comme Olmert. Au long des années, la Knesset a adopté des lois draconiennes pour limiter à pratiquement rien les contributions légales que les donateurs légaux peuvent faire dans les campagnes politiques. Dans le même temps, la Knesset a laissé en place d’énormes lacunes qui permettent à des politiciens de lever des fonds presque illimités de contributions non officielles, ou « argent souple ».

De la façon dont il se tient, le système favorise ceux qui sont constitutionnellement enclins à opérer à la marge de la loi – à savoir des gens comme Olmert.

Puisque les lois de financement de campagnes en Israël ont été rédigées pour des anges, et puisque les politiciens sont de simples mortels, la plupart des officiels élus sont exposés à des enquêtes sur leurs finances. Cela confère un énorme pouvoir aux procureurs de l’Etat et aux juges par rapport aux politiciens. Ils savent qu’ils peuvent parfaitement s’attendre à trouver quelque chose sur chacun s’ils examinent juste assez sévèrement. Et puisque une inculpation suffit  à obliger un officiel élu à quitter sa charge, la magistrature du procureur de l’Etat détient le pouvoir de chasser les officiels élus selon son bon vouloir.

Cela ne serait pas trop mauvais si la magistrature et le système judiciaire de l’Etat n’étaient si politisés. Mais ils le sont. Puisque les juges et les procureurs ne font pas mystère de leur plateforme idéologique gauchiste radicale, des politiciens mis en cause sur le plan légal comme Olmert et l’ancien premier ministre Ariel Sharon comprennent que la meilleure manière d’éviter une enquête judiciaire est de faire avancer le projet politique de la fraternité légale.

On pourrait remédier aisément à ces problèmes par une action législative. Si la Knesset adoptait des lois pour réformer les lois de financement des campagnes électorales, et affirmer sa supervision sur la magistrature d’Etat et l’appareil judiciaire, nombre de ces problèmes seraient résolus.
Mais la Knesset est sans pouvoir pour agir.

Selon l’état des choses, la Knesset, supposée être le dépositaire souverain de la volonté du Peuple, est de très loin la branche la plus faible du gouvernement. Elle n’a aucun pouvoir pour mettre en place des contrôles ou des équilibres soit sur le pouvoir judiciaire, ou sur le gouvernement.

La faiblesse relative de la Knesset est une résultante du système israélien d’élections à la proportionnelle intégrale. Ce système – où les électeurs sélectionnent un parti plutôt que des candidats dans les urnes – promeut la fortune politique du corrompu et du faible, aux dépens de l’honnête et du fort. De même, il prolonge la durée de vie de gouvernements de coalition, avec une tendance à la corruption et à une politique défaillante, aux dépens de gouvernements de coalition fondés sur les principes et l’intérêt national.

Le modèle électoral proportionnel d’Israël permet à une pléthore de partis d’être élus à chaque élection générale.  Inévitablement, au moins un parti parvient à la Knesset, en n’ayant aucune chance d’être réélu. Dans la Knesset actuelle, ce parti est celui des retraités Gil. Lorsque que les parlementaires d’un mandat arrivent à son terme en sachant qu’ils ne seront jamais réélus, ils deviennent des « flottants à la dérive », qu’aucun autre principe ne motive  que de maximiser leurs gains personnels à partir de leur brève carrière politique. Des parlementaires d’un seul mandat tendent à se vendre de façon répétée à d’autres partis, offrant leur loyauté pour la durée de leur mandat.

Puis il y a les « partis blocs » – comme le Shas – qui n’a aucune allégeance envers une philosophie politique particulière, mais vote toujours comme un bloc discipliné. Dans le passé, le président des USA, Lyndon B. Johnson, définissait un « politicien honnête » comme quelqu’un « qu’on n’achète pas ». L’existence de « partis blocs » comme le Shas dans la politique israélienne encourage des politiciens a agir de façon « déshonnête », selon la définition de LB Johnson.

Comme les ‘flottants à la dérive’, les partis blocs sont constamment à vendre. Incapables de les acheter inconditionnellement, les chefs de coalition sont obligés de les acheter à chaque tournant critique, à moins qu’ils ne verrouillent le gouvernement et n’obligent les dirigeants politiques nationaux à accepter des élections anticipées. Dans le cas de Shas, chaque crise nationale fomente une crise de la coalition dans laquelle le premier ministre est obligé d’acheter de nouveau la loyauté de Shas.

Si la présence durable des ‘flottants à la dérive’ et des partis blocs tend à corrompre la politique de coalition, la manière dont les politiciens sont élus à leur poste tend à corrompre le système politique entier.
Les scrutins de parti sont un instrument émoussé pour les électeurs. Les électeurs traduisent leur vote en un choix parmi les dirigeants de parti. Du fait qu’il n’il y a pas de vote direct pour les députés, les dirigeants de parti sont investis de l’énorme pouvoir de déterminer l’identité des législateurs d’Israël. Leurs préférences sont très différentes de celles du public de base.

A l’opposé du public, les dirigeants politiques ne sont pas intéressés par des députés de leurs partis peuplés de dirigeants s’appuyant sur les principes. De tels députés, après tout, ont tendance à se révolter contre leurs dirigeants quand ils prennent de mauvaises décisions, ou bien dénuées de principes. Cela a été le cas par exemple quand le député alors au Likoud Ouzi Landau, a tenté de bloquer le plan de retrait de Gaza de l’ancien premier ministre Sharon.

Le pouvoir des dirigeants de parti de sélectionner les législateurs d’Israël assure que la plupart de ceux qui votent les lois du pays sont faibles, corruptibles et contrôlables. Et le public n’y peut rien. Et si cela n’était pas encore assez déplorable, il y a le fait que tous les membres de la Knesset sont élus sur des listes nationales. L’absence de districts électoraux en Israël signifie qu’aucun législateur n’est d’aucune manière responsable devant ses électeurs – mais seulement à l’égard des dirigeants de leur parti, et à divers degrés, des membres de leur parti. Agir contre la volonté du public pour se faire bien voir des chefs politiques est le mode d’action politique le plus raisonnable pour un politicien.

C’est du fait de la médiocre qualité des législateurs élus par le système dysfonctionnel d’Israël que la Knesset, en tant qu’organisme, manque de la légitimité publique pour mettre en pratique le type de réformes électorales et constitutionnelles nécessaires pour donner un coup de propre à la politique, et maîtriser la fraternité légale majestueuse d’Israël. Et c’est aussi du fait de la qualité médiocre des législateurs d’Israël que les députés à la
Knesset ne sont pas intéressés à la mis en œuvre de ces réformes cruciales.

Les poches pleines de liquide d’Olmert pourraient finalement apporter la comptabilité politique la plus attendue. Mais jusqu’à ce que les failles du système politique israélien soient réparées, il y a peu de doute que les Israéliens vont continuer de se demander si nos dirigeants prennent leurs décisions de bonne foi, ou bien par allégeance à ceux qui leur bourrent les poches.

Publié dans ISRAEL

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