« Ceux qui se sentent français, levez le doigt. »

Publié le par shlomo


Reportage édifiant publié par Le Monde du 19-20 octobre. Belle mise en page, superbe photo. C’est le récit d’un cours d’instruction civique et sociale donné au collège Roger Martin du Gard à Epinay sur Seine, trois jours après que la Marseillaise ait été sifflée lors du match France –Tunisie.

À la question posée par le professeur, organisateur de cette « libre discussion » : « Que ceux qui se sentent français lèvent la main ! », seuls quatre élèves de cette assemblée de trente collégiens âgés de 12 à 16 ans répondent par l’affirmative.

On nous précise que, dans cette classe, il y a un blanc et une Asiatique, tous les autres étant noirs ou Maghrébins.

Le professeur, Monsieur Tchicaya, est lui-même noir. Il est un porte-parole de l’association Devoir de mémoire dont l’objectif est de lutter contre les discriminations dont sont victimes « les enfants de l’esclavage et de la colonisation

Les élèves, parmi lesquels quelques siffleurs dont les propos sont cités, non seulement ne se « sentent » pas français mais s’éprouvent comme étrangers en France du fait, affirment-ils, d’y être traités « de sales Arabes ou de sales nègres » par « Les Français, les Blancs qui se croient supérieurs

Comme le dit l’une des intervenantes qui a « hué » au cours du match de football, « ça ne veut pas dire que je suis raciste des Français. »

Non, bien sûr, la dénégation vaut pour ce qu’elle est dans l’innocence d’une bouche juvénile !

À lire ces propos tenus par ces jeunes issus de l’immigration, on a l’impression que leurs auteurs sont pris dans un discours d’exclusion dont ils se font l’écho et dont le pathétique se résume par ce « nous sommes un peu de nulle part », comme le dit l’un des élèves.

Seul, l’un deux reconnaît qu’il préférerait vivre au Maroc, son pays d’origine où il passe ses vacances.

On a envie de dire à ces collégiens, que leur professeur considère « comme de petits héros » en s’indignant que des membres du gouvernement les aient traités d’imbéciles, qu’ils ne savent pas leur envie de se faire battre en adoptant des postures qui n’ont rien à voir avec le racisme dont ils se disent victimes bien qu’ils puissent l’être encore parfois.

Ce qu’ils méconnaissent - mais quelle parole juste pourrait-elle les aider à en prendre conscience ? – c’est que leur sentiment de n’être de nulle part s’est forgé à partir de l’ambivalence de leurs parents tant à l’égard du pays d’accueil que de leur pays d’origine.

Cette ambivalence se nourrit de l’histoire coloniale où la France fut dominatrice, ce qui a laissé un sentiment d’infériorité dans des pays dont ni le régime politique ni les résultats économiques n’ont réussi à libérer leurs ressortissants.

La nationalité française, qui pour beaucoup encore est celle des anciens dominateurs, ne peut être pleinement acceptée puisqu’elle réitère, malgré tous ses avantages, et justement parce que particulièrement avantageuse par rapport aux pays d’origine, le sentiment d’infériorité et de culpabilité qui est la source du mal être de ces personnes.

Participer à la victimisation des banlieues, produire de perpétuels héritiers de l’ère coloniale et de l’esclavage en tronquant l’histoire - notamment en passant sous silence les pratiques ancestrales de l’esclavage en Afrique ainsi que la traite pratiquée par les Arabes, leur conquête, colonisation et islamisation de l’Afrique du Nord, bien avant les Européens – relève d’une désinformation contre productive, contraire à la liberté et à la dignité de tous ceux qui aujourd’hui ne peuvent pas se « sentir ».

Marc Nacht, 20 octobre 2008

Publié dans FRANCE

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