LA FIN D'EPOQUE ?
in Arouts Sheva
Beaucoup d'Israéliens se demandent, et avec eux, une grand nombre de Juifs à travers le monde, ce qui a bien pu changer dans la mentalité israélienne pour qu'un sionisme militant et bâtisseur ait pu se transformer ces dernières années en "realpolitik" frileuse et en une volonté affichée (et concrétisée) de céder des parts de plus importantes d'Erets Israël, quitte à en déraciner les Juifs et y détruire l'œuvre de leur vie.
Les pressions extérieures – qui existent – n'expliquent pas tout sur ce qui semble être un changement de cap à 180°.
Une récente étude du Dr Oudi Lebel tend à apporter une explication qui a déjà été entendue dans certains cercles restreints, mais qui sera présentée jeudi à l'Université d'Ariel (Samarie), en même temps que plusieurs dizaines d'autres, toutes centrées sur le contexte de la Judée-Samarie. Le travail du Dr. Lebel, effectué dans le domaine socio-politique, avance que les élites de la population "ashkenaze-laïque-socialiste-colombe" tenteraient de reprendre les rênes d'un pouvoir politique et militaire qui leur a appartenu pendant des décennies, et qui semble aujourd'hui lui échapper au profit de la "périphérie", c'est-à-dire les classes moyennes et populaires, plus traditionalistes et religieuses, majoritairement séfarades, et plutôt situées à droite en politique étrangère.
Cette recherche voit dans les jeux de forces et les influences des groupes composant la société (causes internes) les leviers principaux de l'évolution de la politique, et non les circonstances internationales ou géostratégiques(causes externes). Dr. Lebel a concentré ses recherches sur l'observation de certains groupes de la société israélienne au moment de l'expulsion du Goush Katif et après.
Ses conclusions sont globalement les suivantes: jusqu'à la Guerre des Six Jours, les élites du pays, citées plus haut, dominaient la sphère politico-militaire israélienne. Mais vers les années 1980, ils abandonnèrent peu à peu ce domaine pour diriger leur influence vers d'autres domaines: ce fut l'époque des révolutions médiatique et judiciaire. Parallèlement, le monde politico-militaire vit l'arrivée d'une nouvelle génération, formée d'avantage de gens originaires des pays orientaux, de représentants des couches moyennes, et de personnes situées politiquement plus à droite. La victoire de Menahem Begin en 1977 en fut l'un des points de départ.
Après la 1ère Intifada, (1987-88), les anciennes élites décidèrent de repartir à la reconquête de l'instrument politique, au moyen d'une idéologie complètement redéfinie, et tournée vers un repli en matière de politique étrangère: le point de départ fut l'élection d'Itsh'ak Rabin, les accords d'Oslo, le retrait confus du Liban, la 2e Intifada non combattue, la volte-face d'Ariel Sharon et la tragédie du Goush Katif, et enfin la création de partis tels que Shinouï ou Kadima.
Ces conclusions peuvent paraître arbitraires ou hasardeuses, mais le Dr. Lebel a effectué un travail scientifique, basé sur l'observation de nombreux supports: documents politiques officiels, débats politiques ou entre groupes sociaux, extraits de presse, émissions télévisées, forums sur Internet et enfin, interviews de personnalités issues des principaux groupes observés: sionisme religieux, médias, monde judiciaire, militaires, académiciens etc.
Ce qu'essaie de nous expliquer le Dr. Lebel à travers cette étude, c'est qu'il existe aujourd'hui une confrontation entre deux mondes: l'un, qui sachant sa "fin" proche, et tente encore d'imprimer par tous les moyens son empreinte à la société et à l'Etat, et l'autre, plus motivé, qui s'apprête à prendre la relève.
Pour une certaine forme de sionisme, nous assistons à un "Chant du Cygne"...et il y en a qui ne trompent pas!