La guerre d’Israël contre le Hamas
De plomb, des toupies et de l’héroïsme juif
Pierre Itshak Lurçat
Les opérations militaires déclenchées samedi dernier par Israël contre le Hamas ont reçu le nom d’opération « Oferet yetsouka », c’est-à-dire « plomb fondu ». Les médias étrangers ont tous repris cette dénomination, sans s’interroger généralement sur sa signification. « Oferet », le plomb en question, évoque en français celui dont sont faites les balles, ou encore les soldats de plomb… Mais en hébreu, l’expression « plomb fondu » fait référence à tout autre chose : il s’agit d’une allusion à une chanson écrite par le poète Bialik sur la fête de Hannoukah, dont une strophe dit : « mon oncle m’a offert une toupie, une toupie de plomb fondu ».
Certains commentateurs en Israël n’ont pas manqué d’ironiser sur le choix de ce nom donné aux opérations militaires. Une toupie, pour désigner une guerre meurtrière contre le Hamas ? Une chanson de Bialik, le « poète de la renaissance nationale juive », qui est enseigné aujourd’hui surtout aux enfants des écoles maternelles et primaires ? S’agit-il d’un trait d’humour mal placé de la part d’un membre de l’état-major ? La tendance israélienne à se moquer de tout - et surtout de soi-même – et la manie très actuelle de briser tous les mythes, même les plus beaux et les plus essentiels à notre survie en tant que nation, ne doivent pourtant pas masquer ce qu’il y a de vrai et de profond dans ce choix, qui exprime mieux que des longs discours l’attitude juive envers la guerre et envers l’héroïsme militaire.
Israël uni dans la prière et dans la guerre
Dan Margalit écrivait ce matin (dimanche) dans les colonnes du journal Israeli Hayom qu'il y avait des jours, en Israël, où chaque Juif était plongé dans la prière, qu'il soit pratiquant ou non, « dati » ou « hiloni ». En vérité, il n'existe pas de Juif 100 % « hiloni », de Juif qui soit totalement sourd au langage de la prière, qui est sans doute le plus beau cadeau que le peuple Juif a offert à l'humanité. Hier, à Jérusalem, au Kottel où je m'étais rendu pour demander à l'Eternel de protéger nos soldats, il n'y avait pas foule, en cette soirée de sortie du shabbat. Pourtant, on sentait confusément que le pays tout entier partageait cette prière.
Et le soir même, le porte-parole de l'armée, le général Avi Benayoun, déclara à la télévision que « tous les citoyens d'Israël étaient unis dans la prière pour le salut de nos soldats », mots qui n'étaient pas des paroles convenues, mais qui exprimaient véritablement la réalité intime du pays en cette heure grave. Le lendemain, tous les journaux publiaient en première page la photo des combattants de Tsahal lisant la prière spéciale rédigée par le rabbin de l'armée, avant de partir au combat. Le quotidien Maariv relatait l'émotion de ces jeunes soldats, au moment où ils recevaient la bénédiction du rabbin de Tsahal, venu les accompagner avant qu'ils entrent dans Gaza.
Ce soir, alors que s'achève la première journée de combats terrestres, avec aussi, hélas, les premières victimes dans les rangs de nos soldats, ce sont les versets des Psaumes qui sont prononcés dans des milliers de maisons juives, dans tout Israël. Voici ce qu'écrivait le Roi David, et qui prend aujourd'hui un sens nouveau : « Ô Dieu, c'est toi qui me procures vengeance, qui fais tomber des peuples à mes pieds ; qui m'arraches à mes ennemis, me fais triompher de mes agresseurs, et échapper aux hommes de violence » (dans l'hébreu du Tanakh, violence se dit « Hamas »). Si vous n'avez pas encore lu un Psaume pour nos soldats, faites-le sans attendre !